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Publié le 24 septembre 2018

Agoria lance un avertissement face à l’impact de la demande de main-d’oeuvre sans cesse croissante. À politique inchangée, la Belgique comptera pas moins de 584.000 postes vacants non pourvus en 2030. C’est ce que révèle une étude menée par Agoria et les différents offices régionaux de l’emploi.

Agoria, la fédération de l'industrie technologique, en collaboration avec les offices régionaux de l'emploi VDAB, Forem et Actiris, a analysé les grandes tendances sur le marché du travail jusqu'à 2030 en Belgique.

Cette étude inclut des évolutions pour le pays, les trois régions, 16 secteurs d'activité et 75 profils d'emploi, des prévisions quantitatives et qualitatives, la perte, la création et l'évolution des emplois, le nombre de postes vacants et le chômage par région, secteur et profil, les flux de travailleurs entrants et sortants, l'écart entre la demande et l'offre, les compétences numériques pour l'avenir ainsi que des recommandations à l'attention des décideurs politiques.

Le marché du travail jusqu'en 2030


La digitalisation et la dynamique économique qui sont déjà amorcées aujourd'hui mèneront sans aucun doute à une destruction d'emplois. Mais pour chaque emploi perdu à l'avenir, 3,7 nouveaux seront créés à la place.

La demande de travailleurs dépassera l'offre à partir de 2021. Le fossé entre les deux ne cessera de se creuser jusqu'en 2030 au moins. D'ici là, le contenu de nombreux emplois évoluera également, obligeant les travailleurs à se recycler et à approfondir leurs connaissances.

La digitalisation aura un impact sur le marché du travail dans son ensemble. 4,5 millions de travailleurs devront régulièrement mettre à niveau leurs compétences.

Certains emplois disparaîtront, tandis que d'autres se transformeront. Mais les postes à pourvoir vont surtout se multiplier. Si des mesures ne sont pas prises, la Belgique comptera pas moins de 584.000 postes vacants non pourvus en 2030 Nous subirons de cette manière une perte de valeur ajoutée supplémentaire se chiffrant à 60 milliards d'euros de PIB.

310.000 travailleurs et demandeurs d'emploi auront en outre besoin d'être formés à un nouvel emploi, durable. S'ils le sont effectivement, nous éviterons une perte d'emplois équivalente à 35 milliards d'euros de PIB. Au total, 95 milliards d'euros sont dans la balance d'ici 2030, soit 16,5% du PIB.

Davantage d'emplois disponibles


Si certains emplois, tels que guichetier, ouvrier ou caissier, sont en recul, d'autres, comme celui de représentant de commerce ou d'opérateur en production, sont en pleine transformation.

Certaines fonctions (personnel de soin, experts numériques, etc.) progressent également, tandis que d'autres, totalement nouvelles (planificateur de mobilité ou coach en consommation), voient le jour.

Flux entrant de main-d'oeuvre limité


Alors que la demande de main-d'oeuvre va progresser de 0,9% par an jusqu'en 2030, l'offre ne va, quant à elle, augmenter que de 0,3% par an sur la même période. Cette croissance de l'offre est principalement liée à la sortie de l'enseignement.

D'autres facteurs, tels que la migration, ne jouent qu'un rôle limité. À partir de 2021, le flux entrant de main-d'oeuvre ne suffira dès lors plus à répondre à la demande croissante de travailleurs. Pour y satisfaire, des mesures s'imposeront.

Ces prévisions tiennent compte du relèvement progressif de l'âge de la pension à 67 ans en 2030.

584.000 postes vacants non pourvus d'ici 2030


En raison de la pénurie structurelle de main d'oeuvre et d'un manque d'adaptation des compétences, un emploi vacant sur 10 (11%) risque de ne pas être pourvu en Belgique en 2030.

Cependant, l'on constate de nettes différences entre les régions et secteurs. Ce risque est particulièrement important en Flandre (12%) et à Bruxelles (10%), et moins élevé en Wallonie (7%).

D'un point de vue sectoriel, ce sont surtout les soins de santé (18%), les TIC (18%) et l'enseignement (13%) qui seront touchés. La demande croissante de travailleurs et le flux entrant limité de diplômés dans ces secteurs en sont la cause principale.

Quatre stratégies pour un marché du travail durable


Agoria a également réalisé une analyse micro-économique de 75 profils d'emploi. Cette approche globale permet à la fédération de formuler des recommandations concrètes pour le marché du travail jusqu'en 2030 et de prendre à temps les mesures adéquates avec l'ensemble des parties prenantes.

Mise à niveau des compétences de 4,5 millions de travailleurs

Il s'agit de mettre à niveau, de manière proactive, les compétences numériques et associées de 4,5 millions de travailleurs.

La digitalisation et la dynamique économique auront un impact sur le contenu de pratiquement toutes les fonctions, à tous les niveaux. Le niveau de compétences numériques moyen souhaité augmente globalement, tout comme celui des compétences générales. Il y a du changement en perspective pour quasiment tous les travailleurs.

Recyclage de 310.000 travailleurs et demandeurs d'emploi d'ici 2030

310.000 personnes (travailleurs ou demandeurs d'emploi) devront se recycler d'ici 2030 afin de pouvoir (continuer à) occuper une fonction durable. Certaines (150.000) auront besoin d'un recyclage limité de 2 à 6 mois et d'autres (160.000), d'une formation intensive de 6 à 18 mois.

Agoria plaide pour une communication plus ciblée à propos des opportunités sur le marché du travail et l'élaboration de programmes de reconversion professionnelle pour les demandeurs d'emploi et les profils d'emploi menacés.

La fédération souhaite également faciliter la mobilité interrégionale, rendre le marché du travail plus flexible et adapter la sécurité sociale afin de favoriser le passage à un emploi durable.

Pourvoir 268.000 postes vacants par l'activation

Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires, 584.000 postes vacants ne seront pas pourvus en 2030. Pour pouvoir répondre à cette importante demande de main-d'oeuvre, un maximum de personnes devront être activées.

L'analyse d'Agoria indique que l'activation permettrait de pouvoir 268.000 postes vacants. Agoria propose plusieurs mesures : activer des demandeurs d'emploi, stimuler la migration économique, travailler plus et/ou plus longtemps et mieux adapter les études et leur choix à la demande de main-d'oeuvre.

Plus de productivité : réduire la demande de main-d'oeuvre par une digitalisation accélérée

L'activation ne permet de pourvoir qu'une partie des 584.000 postes vacants. Après l'activation, il subsiste toujours 316.000 postes vacants. Une augmentation plus soutenue de la productivité s'avère donc nécessaire.

Le moyen le plus facile pour y parvenir consiste à accélérer l'automatisation et la digitalisation dans les secteurs présentant le plus grand nombre de postes vacants. Une productivité accrue permettrait de pourvoir 208.000 emplois.

Il subsisterait donc 108.000 postes vacants sur les 584.000. Cela correspond à 2% de la population active, ce que nous considérons comme un "taux de vacance d'emploi naturel".

De l'étude à l'action. Un programme pour l'avenir


Les profonds changements sur le marché du travail nécessitent une approche commune. Le travail du futur est en effet l'affaire de tous : pouvoirs publics, entreprises et fédérations, travailleurs et demandeurs d'emploi.

En concertation avec toutes les parties prenantes, Agoria examinera dès lors d'autres mesures afin d'exploiter au maximum les opportunités qui se présentent. Sous le slogan "Be the change", Agoria appelle tout un chacun à oeuvrer à ce "travail du futur" en avançant des idées et actions. Le programme comprendra notamment des débats, workshops et formations.