Digital Wallonia, en collaboration avec le CRIDS, présente les principales informations qui doivent figurer sur le site internet d’un site de vente en ligne, notamment dans des conditions générales ou une politique de confidentialité. Il ne s’agit pas d’être exhaustif mais d’attirer l’attention de la PME sur certaines informations spécifiques (comme le droit de rétractation, par exemple).
Diversité des obligations d’information
Dès qu’une entreprise utilise l’internet dans le cadre de son activité professionnelle, comme vitrine pour présenter ses produits ou, s’agissant d’un site transactionnel, pour distribuer ceux-ci à ses clients (professionnels ou consommateurs), il lui incombe de respecter diverses obligations d’information prescrites par la loi.
En matière d’obligation d’information, il convient de se poser trois questions :
- Quelles sont les informations à fournir ou à mettre à la disposition du consommateur ?
- Comment les obligations d’information doivent-elles être accomplies ?
- Quand les obligations d’information doivent-elles être observées ?
De nombreuses dispositions légales ou réglementaires imposent des obligations d’information aux entreprises.
Leur champ d’application dépend principalement de la qualité des parties (relation B2B, entre une entreprise et une autre entreprise ; relation B2C, entre une entreprise et un consommateur), l’objet du contrat (assurance, services financiers, voyage, vente, services juridiques, contenus numériques, etc.) ou le recours éventuel à des techniques de communication à distance (téléphone, correspondance « papier » ou par courriel, sites web, applications pour appareils mobiles, etc.). Dans le présent article, on peut difficilement présenter toutes ces exigences.
Une analyse au cas par cas doit en effet être réalisée par l’entreprise pour identifier précisément les obligations qui lui incombent. On se limite donc aux obligations d’information que la loi impose lorsque l’entreprise recourt aux technologies de l’information et de la communication, et qui figurent dans le livre VI et le livre XII du Code de droit économique.
On distingue les obligations qui s’imposent aux entreprises dans ses relations B2B et B2C, et celles qui sont spécialement prescrites lorsque l’entreprise s’adresse à des consommateurs. On aborde également les sanctions susceptibles de s’appliquer en cas de non-respect de ces exigences.
On renvoie également aux informations données par le SPF Economie, et figurant sur le site didactique https://infoshopping.be/fr.
Obligations d’information à respecter dans les relations B2B et les relations B2C
Des obligations générales d’information s’imposent à tout prestataire d’un service de la société de l’information. Le service de la société de l’information est « tout service presté normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire du service » (art. I.18, 1°, du Code de droit économique).
La notion est large : on vise les sites de commerce électronique (y compris les applications sur les appareils mobiles), les sites de partage de contenus, les réseaux sociaux, les sites d’information en ligne (sur les entreprises, par exemple), la publicité par internet, etc.
L’article XII.6, § 1er, du Code de droit économique liste les informations requises de la part du prestataire (quelles informations ?) :
- son nom ou sa dénomination sociale ;
- l'adresse géographique où le prestataire est établi;
- ses coordonnées, y compris son adresse de courrier électronique, permettant d'entrer en contact rapidement et de communiquer directement et efficacement avec lui;
- le cas échéant, le numéro d'entreprise;
- dans le cas où l'activité est soumise à un régime d'autorisation, les coordonnées de l'autorité de surveillance compétente;
- en ce qui concerne les professions réglementées :l'association professionnelle ou l'organisation professionnelle auprès de laquelle le prestataire est inscrit,le titre professionnel et l'état dans lequel il a été octroyé,une référence aux règles professionnelles applicables et aux moyens d'y avoir accès;
- dans le cas où le prestataire exerce une activité assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, le numéro d'identification visé à l'article 50 du Code de la taxe sur la valeur ajoutée;
- les codes de conduite auxquels il est éventuellement soumis ainsi que les informations relatives à la façon dont ces codes peuvent être consultés par voie électronique.
Ces informations doivent être disponibles en permanence, peu importe que le site internet permette de faire des achats en ligne ou pas, ou, sous réserve du point 8°, qu’il s’adresse à des consommateurs ou à d’autres entreprises (quand ?). S’agissant de la manière dont ces informations doivent être transmises (comment ?), l’article XII.6, précité, indique que le prestataire doit assurer un « accès facile, direct et permanent » à ces informations. En pratique, on recommande aux entreprise de faire figurer ces informations dans leurs conditions contractuelles ou tout autre document identifié de manière explicite et accessible sur toutes les pages du site internet.
Une information spécifique concerne également les prix : il est en effet requis que, lorsque des prix sont mentionnés, ceux-ci soient indiqués « de manière claire et non-ambiguë et précisent notamment si les taxes et les frais de livraison sont inclus » (art. XII.6, § 2, du C.D.E.).
Même si ce n’est normalement pas une obligation, les parties prudentes veilleront généralement à rédiger un document reprenant les droits et les obligations de chacune d’elles. Dans la majorité des cas, il est établi de manière unilatérale par l’une des parties et ne fait pas l’objet de négociations entre elles (c’est à prendre ou à laisser). C’est normalement la manière de faire dans les relations entre une entreprise et un consommateur. On parlera de « conditions générales » ou de « conditions contractuelles ». On y trouve les informations que la loi impose aux entreprise de mentionner (notamment des obligations d’identification) et celles que l’entreprise décide d’y inclure, et qui sont généralement en sa faveur (sanctions éventuelles en cas de retard de paiement ; droits de propriété intellectuelle ; clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité ; loi applicable et juridiction compétente en cas de litige ; etc.).
L’entreprise devra s’assurer que ces « conditions générales » ont force obligatoire (ou sont opposables à leur destinataire) : c’est en effet la condition sine qua non si elle souhaite s’en prévaloir dans un litige ultérieur avec son cocontractant. On considère traditionnellement que les conditions générales sont opposables à leur destinataire lorsque celui-ci a eu la possibilité d’en prendre connaissance, de manière effective, avant la conclusion du contrat, et qu’il les a acceptées de manière certaine (expressément ou tacitement). En cas de litige, il appartiendra au juge de vérifier que ces conditions ont été respectées. Tel ne sera normalement pas le cas si les conditions générales sont rédigées de manière quasi-illisible ou inutilement complexe, si elles sont mises à la disposition du destinataire pour la première fois après la conclusion du contrat ou si l’intitulé du lien hypertexte qui renvoie vers celles-ci est ambigu (« divers » ; « informations générales » ; etc.) ou figure uniquement sur la page d’accueil du site. La loi impose également que « les clauses contractuelles et les conditions générales communiquées au destinataire doivent l’être d’une manière qui lui permette de les conserver et de les reproduire » (art. XII.7, § 2, du C.D.E.). Concrètement, il doit avoir la possibilité de les imprimer ou de les enregistrer sur son ordinateur.
Obligations d’informations additionnelles à respecter dans les relations B2C
Le législateur considère que le consommateur est en position de faiblesse dans ses relations avec les professionnels (les entreprises). Cette faiblesse trouve notamment son origine dans le recours aux technologies de l’information ou la circonstance que le contrat est conclu à distance, autrement dit sans que les parties soient en présence physique l’une de l’autre (et sans possibilité, notamment, de voir le bien et de l’essayer comme on pourrait le faire dans un magasin traditionnel).
Aussi la loi impose-t-elle diverses obligations d’information au bénéfice des consommateurs.
On les trouve dans le livre VI du Code de droit économique, dans un chapitre sur les contrats à distance. Une distinction est faite entre les contrats à distance portant sur des services financiers (un contrat d’assurance conclu sur un site web, par exemple) ou ne portant pas sur des services financiers (l’achat d’une paire de chaussures sur un site de commerce en ligne, par exemple). Seules les règles applicables aux contrats à distance ne portant pas sur des services financiers sont étudiées ici.
Des obligations sont d’abord prescrites avant la conclusion du contrat :
L’article VI.45, § 1er, du Code de droit économique contient une longue liste d’informations que l’entreprise doit fournir au consommateur (quelles informations ?) avant que celui-ci ne soit lié par un contrat ou par une offre (quand ?). Elles portent notamment sur les principales caractéristiques du bien ou du service, sur l’identité et les coordonnées de l’entreprise, sur le prix, sur les modalités de livraison ou sur certains droits du consommateur (droit de rétractation, garantie légale de conformité pour les biens, possibilité de recours à une procédure extrajudiciaire de réclamation ou de réparation). S’agissant des informations sur le droit de rétractation, le législateur met à la disposition des entreprises un modèle, qu’il leur suffit de recopier en l’adaptant à leur situation.
La manière dont l’entreprise doit s’acquitter de son obligation d’information est aussi indiquée : elle doit en effet fournir les informations ou les mettre à la disposition du consommateur « sous une forme adaptée à la technique de communication à distance utilisée dans un langage clair et compréhensible » (art. VI.46, § 1er, du C.D.E.).
La loi ajoute encore que « les sites de commerce en ligne indiquent clairement et lisiblement, au plus tard lors du début du processus de commande, si des restrictions de livraison s’appliquent et quels moyens de paiement sont acceptés » (art. VI.46, § 3, du C.D.E.).
Des obligations d’information sont aussi imposées par le livre XII du Code de droit économique et ce, avant le début du processus de commande (quand ?). Elles portent sur « 1° les langues proposées pour la conclusion du contrat; 2° les différentes étapes techniques à suivre pour conclure le contrat; 3° les moyens techniques pour identifier et corriger des erreurs commises dans la saisie des données avant que la commande ne soit passée; 4° si le contrat une fois conclu est archivé ou non par le prestataire de services et s'il est accessible ou non » (art. XII.7, § 1er, du C.D.E. – quelles informations ?).
En pratique (comment ?), l’entreprise veillera à mentionner les informations requises dans ses conditions générales (normalement accessibles sur chacune des pages du site internet) ou dans les sections pertinentes du site web (pour la description des biens par exemple, ou les prix).
Des obligations d’information doivent aussi être observées juste après la conclusion du contrat :
Dans un délai raisonnable après la conclusion du contrat (et au plus tard au moment de la livraison du bien ou au début de l’exécution du service – quand ?), l’entreprise doit confirmer au consommateur que le contrat a été conclu, et inclure, dans cette confirmation, les informations visées à l’article VI.45, § 1er, du Code de droit économique, précité (quelles informations ?). On trouve cette exigence à l’article VI.46, § 7, du Code de droit économique. D’un point de vue formel, les informations doivent être « fournies » sur un « support durable ». L’exigence de fourniture requiert un comportement actif de la part de l’entreprise, le consommateur pouvant quant à lui rester passif. Il est donc insuffisant de mettre les informations à la disposition du consommateur, à charge pour lui de faire les démarches qui s’imposent pour trouver l’information sur le site internet et en prendre connaissance. Quant au support durable, il désigne le « papier », dans l’environnement traditionnel, et tout procédé qui remplirait les mêmes fonctions de lisibilité, de pérennité et d’intégrité, dans l’environnement numérique. Il peut par exemple s’agir d’un document au format .pdf annexé à un courriel de confirmation transmis par l’entreprise. Si l’entreprise se contente de renvoyer, par un lien hypertexte figurant dans le courriel de confirmation, vers les conditions générales qui se trouvent sur son site internet, on considérera normalement que l’obligation de confirmation n’a pas été accomplie valablement.
Il est par ailleurs requis du prestataire de services qu’il accuse réception de la commande sans délai injustifié et par voie électronique, et que cet accusé de réception contienne notamment un récapitulatif de la commande (art. XII.9 du C.D.E.).
En pratique, l’entreprise peut transmettre un seul courriel de confirmation qui contient les données requises par l’article VI.46, § 7, et l’article XII.9 du Code de droit économique.
Que risque l’entreprise qui ne respecte pas ces obligations ?
L’entreprise qui se lance dans le commerce en ligne doit veiller à respecter scrupuleusement ces obligations d’information. A défaut, elle s’expose à des sanctions civiles et/ou pénales, et des recours introduits par les autorités publiques, des consommateurs ou des concurrents.
En voici quelques-unes (sans prétendre à l’exhaustivité) :
- Diverses sanctions civiles spécifiques sont prévues par la loi. On relève par exemple :
- Un délai de rétractation de douze mois (au lieu de 14 jours) si l’entreprise omet d’informer le consommateur de son droit de rétractation conformément à l’article VI.45, § 1er, 8° (cf. art. VI.48 du C.D.E.).
- La dispense accordée au consommateur de payer les frais de renvoi du bien en cas d’exercice du droit de rétractation (ou d’autres frais), s’il n’a pas été informé à ce propos par l’entreprise avant la conclusion du contrat (art. VI.45, § 5, du C.D.E.).
- Le non-respect des obligations d’information peut aussi constituer une pratique commerciale trompeuse, et déloyale, interdite par les articles VI.92 et suivants du Code de droit économique. Diverses conditions sont à respecter et, si c’est le cas, une sanction civile spécifique est prévue à l’article VI.38 du Code de droit économique si le contrat a été conclu à la suite de la pratique déloyale : elle permet au juge de condamner l’entreprise à rembourser le prix payé au consommateur, ce dernier étant quant à lui autorisé à conserver le produit.
- Le non-respect des obligations est sanctionné pénalement, par des peines d’amende.
- Un concurrent pourrait également introduire une action en cessation commerciale devant le président du tribunal de commerce, pour se plaindre d’un acte contraire aux pratiques honnêtes du marché.