L’Agence du Numérique a identifié les domaines numériques vers lesquels la Wallonie tend à se spécialiser. Découvrez les axes technologiques forts et les domaines d’application prioritaires et porteurs de la Région. Analyse réalisée dans le cadre du travail de la Stratégie de Spécialisation de la Wallonie.

Axes technologiques et sectoriels prioritaires pour l’écosystème numérique de la Wallonie

Stratégie de spécialisation intelligente de la Wallonie


Comme les autres régions appartenant à l’Union Européenne, la Wallonie est appelée à renouveler sa stratégie de spécialisation intelligente (S3) d’ici la fin de l’année 2020. Cette stratégie conditionne l’accès à diverses sources de financement européen et définit les lignes directrices de la politique économique régionale pour les prochaines années.

La stratégie Digital Wallonia (2019-2024) s’est enrichie de thématiques transversales (société digitale, gouvernance numérique, etc.) et a précisé une série de priorités d’actions. Dans ce contexte, la plateforme digitalwallonia.be a évolué dans le sens d’un outil d’intelligence territoriale. Il s’agit désormais d’une base de données partagée, enrichie par différents acteurs et gérée collectivement. Elle propose des services génériques, avancés et personnalisés. Le thème "Secteur du Numérique" occupe une place particulière au sein de Digital Wallonia. Son développement, sa capacité d’innovation et l’augmentation de sa part dans le PIB de la Wallonie font partie des objectifs identifiés depuis les travaux fondateurs de la stratégie numérique, afin de capter de manière durable le potentiel de croissance de la nouvelle économie au profit du territoire et des acteurs régionaux.

A cet effet, la Wallonie doit disposer d’un réseau d’entreprises proposant des produits et services numériques à haute valeur ajoutée. Ces entreprises doivent quant à elles s’appuyer sur un écosystème numérique intégrant les acteurs de la recherche (centres agréés, universités) et de support (clusters, fonds, accélérateurs, …).

Il est donc très important d’identifier clairement :

  • les points forts actuels de la Wallonie en termes de technologies numériques, tant du point de vue des acteurs et compétences présents sur le territoire que des débouchés internationaux existants ou potentiels;
  • les domaines d’application en termes de secteurs et technologies porteurs qui, s’ils ne constituent pas encore un réel point fort régional pour l’instant, peuvent (ou devraient) le devenir dans les prochaines années.

Pour ce faire, l’Agence du Numérique s’est appuyée sur cinq sources principales :

  1. Son expertise propre en matière de connaissance du secteur numérique wallon et de la transformation numérique des entreprises.
  2. Les tendances technologiques majeures identifiées par le consultant Gartner, leader mondial dans le domaine du numérique (Top 10 Strategic Technology Trends for 2020, Gartner Special Report, octobre 2019).
  3. La structure du secteur wallon du numérique dont l’AdN assure la cartographie permanente au travers de la plateforme digitalwallonia.be. Cette analyse a été réalisée pour les entreprises, les startups et les acteurs de la recherche (Plateforme Digital Wallonia, document interne Agence du Numérique, mars 2020).
  4. L’analyse des activités des acteurs de support de l’écosystème numérique.
  5. Les priorités en matière de technologies et de secteurs cibles des pôles de compétitivité et clusters.

Tendances technologiques


Le consultant Gartner a publié en octobre 2019 son top 10 des tendances numériques majeures. Elles sont regroupées en deux volets principaux (people-centric, smart spaces) et peuvent être résumées comme suit:

People-Centric

  • L’hyper-automatisation
  • La multi-expérience
  • La démocratisation numérique
  • L’humain augmenté
  • Transparence et traçabilité

Smart Spaces

  • Le Edge Computing
  • Le Cloud distribué
  • Les objets autonomes
  • La Blockchain "complète"
  • La sécurité de l’IA

Ces différentes tendances pointent vers quelques technologies clés qui sous-tendent la plupart d’entre elles. On relèvera :

  • Intelligence artificielle, Data & Analytics (tendances 1, 3, 8, 9 et 10);
  • Internet of Things (IoT) (tendances 2, 4, 6 et 8);
  • Expérience immersive (tendances 2 et 4);
  • Blockchain et Cybersécurité (tendances 5, 9 et 10).

Les aspects éthiques, juridiques et sociétaux du numérique prennent une importance croissante dans l’opportunité (et la désirabilité) de développer ou non certaines solutions technologiques (tendances 3, 4, 5, 8 et 10). C’est tout le sens de la thématique "Société digitale" incluse dans la stratégie Digital Wallonia 2019-2024, qui vise justement à intégrer ces aspects dans le développement du numérique sur le territoire wallon. Comme, par ailleurs, cette thématique ne constitue pas une tendance technologique à proprement parler et qu’il ne s’agit pas d’une force ou d’une faiblesse spécifique à la Wallonie, elle ne sera pas abordée plus avant au sein de cet article.

Bien entendu, les tendances technologiques reprises ci-dessus devront faire l’objet d’une réévaluation régulière, le secteur du numérique se caractérisant par une évolution particulièrement rapide.

Analyse quantitative de l’écosystème wallon du numérique (Offre)


La plateforme digitalwallonia.be regroupe notamment plus de 2100 entreprises privées, dont environ 400 startups et plus de 100 acteurs de la recherche, toutes organisées sur base de leurs produits et services.

Ceux-ci sont structurés en 5 catégories principales :

  • Software et développement logiciel;
  • Conseil et services;
  • Hardware et équipements IT;
  • Réseaux et télécoms;
  • ICT Advanced.

Les acteurs envisagés dans l’analyse sont les suivants :

  • les entreprises privées sectorielles;
  • les startups sectorielles, sous-ensemble des entreprises;
  • les acteurs de la recherche;
  • quelques écosystèmes numériques animés au sein de Digital Wallonia en raison de leur nature ou de leur dynamisme.

Les entreprises et startups du secteur du numérique

L’analyse du secteur montre que le développement de software est très largement dominant en Wallonie (58% des entrepris

es y sont représentées). Si on y ajoute les services (45%), on constate que les entreprises wallonnes du numérique restent très (trop) présentes sur un secteur où la concurrence est importante, la délocalisation aisée et la création de valeur ajoutée souvent peu importante.

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A l’intérieur de cette catégorie "Software", 25% des entreprises se concentrent sur des logiciels métiers, ce qui implique évidemment une connexion forte avec, notamment, les pôles de compétitivité ou des secteurs économiques spécifiques.

Toutefois, 17% des entreprises (364 au total) se situent dans la catégorie "ICT advanced". Il s’agit d’une progression très encourageante par rapport aux chiffres de 2018 (+6%) et représentative d’une véritable capacité d’innovation dans le secteur. Dans cette catégorie particulière, l’IoT et les capteurs sont clairement les technologies les plus présentes (40%, soit +15% par rapport à 2018 !).

Les autres technologies sont représentées de manière quasi identique, à l’exception de l’intelligence artificielle (20%), plus présente.

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La comparaison avec les startups est très intéressante. Elle montre que, si la catégorie "Software" y est encore plus importante, c’est également le cas de la catégorie "ICT Advanced" qui implique 23% des startups (contre seulement 17% de toutes les entreprises).

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En résumé, sur l’ensemble de cette catégorie regroupant la plupart des technologies les plus innovantes, près d’une entreprise sur 3 est une startup.

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L’IoT domine clairement le classement pour les startups. L’AR/VR y est un peu plus présent qu’au sein des entreprises considérées dans leur globalité.

Les acteurs de la recherche 

Sur la plateforme digitalwallonia.be, l’option a été prise de classer les acteurs de la recherche sur les mêmes critères que les entreprises. Cette cohérence est très importante pour “superposer” la structuration de la recherche avec celle des entreprises, et donc évaluer si les capacités d’innovation sont traduites en termes d’activité économique.

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L’analyse montre que c’est la catégorie "ICT Advanced" qui est la plus présente, avec 78% des acteurs (58 sur 70) actifs sur au moins un produit / service appartenant à cette catégorie. Si l’on inclut à l’analyse les acteurs de la recherche faisant un usage intensif du numérique dans leur activité, cette proportion s’élève dès lors à 77%, principalement parce que les simulations et jumeaux numériques, ainsi que l’IA, sont indispensables à une recherche de pointe dans leurs domaines (astrophysique, physique des matériaux, optimisation des transports, des dépenses énergétiques, etc.).

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Il apparaît clairement que les technologies qui concentrent l’essentiel des activités des centres de recherche ou universités sont :

  • l’Intelligence Artificielle (que l’on associe au Machine Learning et l’Image Processing) – 67% de la catégorie;
  • l’Internet of Things (IoT) – 36%;
  • la robotique et l’automation – 17%;
  • l’AR/VR – 15%;
  • les jumeaux et simulations numériques – 14%.

Si toutes les universités ont un département qui traite de l’IA, c’est moins le cas pour les centres de recherche. Ce constat est inversé pour l’IoT.

Il y a donc un décalage sensible entre la structuration du secteur économique du numérique et la recherche. Cela confirme la nécessité d’augmenter de manière significative la connexion entre la recherche dans le numérique et la création d’entreprises susceptibles d’exploiter l’innovation issue de cette recherche.

La Blockchain est, à ce stade, très peu représentée, avec seulement 13% de la catégorie "advanced", soit 7 unités de recherche au total. Dans le même ordre d’idées, la cybersécurité ne regroupe que 6 unités de recherche en Wallonie.

Cette situation peut s’avérer préoccupante. Non seulement, la blockchain présente un potentiel très important pour des secteurs tels que l’industrie, la logistique, la traçabilité alimentaire, mais la cybersécurité représente, on l’a vu, une condition importante du succès de la mise en œuvre de nombreuses applications avancées du numérique dans les années à venir.

Paradoxalement, peu de spin-offs semblent sortir des universités dans les domaines de l’IoT et l’IA. Cependant, entre 2018 et mai 2020, la moitié des spin-offs sont néanmoins actives dans les domaines de l’IoT et de l’IA, mais leur nombre reste limité.

A nouveau, la solution semble être d’inciter plus efficacement les entreprises wallonnes (startups ou non) à collaborer avec les universités, qui pourraient amener une "couche technologique avancée" comme facteur de différenciation.

Les écosystèmes

Les écosystèmes numériques se définissent par le regroupement des entreprises de l’offre (secteur du numérique), des entreprises de la demande (un ou plusieurs secteurs spécifiques), des acteurs de la recherche et des partenaires (fédérations, services publics ,pôles, …) autour d’un thème business (industrie du futur, digital commerce, santé, …) ou d’une tendance technologique transversale (Intelligence Artificielle, Cybersécurité, …). Ils constituent une importante source d’information afin d’identifier les domaines d’excellence et d’opportunité pour la Wallonie numérique.

On peut conclure de cette analyse que les domaines d’application les plus développés en Wallonie sont, selon toute apparence, l’Industrie 4.0 et la santé. Les industries récréatives et l’éducation sont également fort bien représentées. Il convient cependant de signaler que la nature de l’écosystème "éducation" est quelque peu différente des autres : il s’agit plus d’un écosystème d’intérêt (regroupant les acteurs intéressés par le sujet) qu’un écosystème technologique ou applicatif au sens strict. Il est d’ailleurs peu développé au niveau de la recherche (voir ci-dessus). En ce sens, le 3e écosystème recensé sur Digital Wallonia est, par ordre d’importance, celui de l’Intelligence Artificielle.

Analyse qualitative des acteurs de support du développement de la Wallonie numérique


L’AdN a identifié une centaine d’acteurs, publics et privés, actifs de manière plus ou moins forte ou régulière dans le support à la transformation numérique de la Wallonie et plus spécifiquement des entreprises.

L’analyse de ces acteurs croise les axes technologiques prioritaires avec la nature de leurs activités. A ce niveau, l’AdN a réparti les acteurs en fonction de leur positionnement sur une chaîne de valeur:

  1. Recherche
  2. Sensibilisation
  3. Développement
  4. Financement
  5. Formation
  6. Internationalisation

Les acteurs ont également été différenciés en fonction de leur focus sur le numérique ou non. Au final, à l’exception des acteurs de la recherche (abordés dans le chapitre 3 de cet article), plus de 50% de ces acteurs n’ont pas d’expertise numérique interne en lien avec les thématiques technologiques.

Dans le cas spécifique des incubateurs/financeurs, aucun (sauf le fonds privé The Faktory par rapport à l’IoT et ID2MOVE dans le domaine des drones) ne semble s’être spécialisé par rapport à une technologie particulière.

Le WSL, avec le WELL, a overt une filière dédiée à l’e-santé, Leansquare a développé un écosystème lié à la Music-Tech et s’intéresse aux applications logistiques. Mais ces structures s’appuient plus sur une expertise de généralistes du business numérique, plutôt que sur une expertise technologique ciblée forte.

En ce qui concerne les centres de compétences numériques (Technifutur, Technofutur, Technocité et Technobel), si certains mettent l’accent sur la cybersécurité, aucun ne propose aujourd’hui des cursus qualifiants sur des technologies numériques avancées. Il importe plus que jamais de renforcer l’offre de formation des centres à la lumière des priorités numériques identifiées pour les années à venir. Des formations qualifiantes dans les domaines de l’IoT, de l’IA et de la cybersécurité, mais aussi par exemple en AR/VR, doivent être rapidement mises sur pied.

Notons que dans le cadre du Programme Digitalwallonia4ai, quatre centres de compétences ont le projet de mettre en place des formations IA qualifiantes dans les mois à venir.

Analyse des domaines d’application et de la demande des entreprises régionales


Cette analyse concerne essentiellement la demande pour des applications B2B et destinées à assurer un développement international des entreprises wallonnes situées dans des secteurs jugés prioritaires. Elle n’aborde pas de manière directe la demande B2C, ni la demande mondiale, dont l’étude détaillée dépasserait le cadre du présent document. Ces deux éléments feront l’objet d’une mise en perspective dans la section 5.3.

Pôles de compétitivité. Secteurs cibles

En termes de secteurs cibles, il ressort que les pôles et clusters sont bien entendu tournés vers la promotion de relations commerciales B2B, puisque la taille du marché wallon ne permet pas, sauf à de rares occasions liées à l’exploitation de marchés de niche, de se positionner sur un marché B2C.

Ainsi, les acteurs ont cité comme cibles prioritaires :

  • les industries manufacturières à 13 reprises;
  • les secteurs de la construction, de la santé et du développement durable, chacun à 5 reprises. Remarquons que ces secteurs représentent d’importants gisements d’emplois pour l’Europe en général et la Wallonie en particulier, dans un contexte de vieillissement de la population et de prise de conscience des impacts de l’activité économique sur l’environnement;
  • le transport et la logistique, la distribution, et les secteurs publics – surtout via le prisme des Smart Cities (4 citations chacun);
  • le secteur agricole (3 citations).

Sans surprise, les secteurs TIC, médias et assimilés ne constituent pas des cibles prioritaires pour les pôles et clusters wallons, à une exception près : le Cluster Twist, très actif dans le domaine des applications du numérique aux industries créatives.

Au final, la confirmation la plus importante est l’orientation clairement "B2B" des pôles. Ce constat croise d’ailleurs celui du baromètre 2017 des startups numériques wallonnes de l’AdN qui montre que 2 startups sur 3 sont orientées vers le B2B.

Pôles de compétitivité. Technologies numériques prioritaires

La plupart des technologies citées sont en corrélation avec les axes technologiques prioritaires identifiés par l’Agence du Numérique sur base des 10 tendances majeures de Gartner. De façon synthétique, sur base des informations reçues des gestionnaires de pôle, on peut dégager une structuration en 4 groupes de technologies :

  • Big/Smart D
    ata. Analytics et intelligence artificielle. Apprentissage machine. Personnalisation.
  • Production intelligente. (Co-)Robotique. Additive manufacturing. Impression 3D. Machine to machine.
  • Internet des Objets (IOT). Applications métiers intelligentes.
  • Réalité virtuelle et augmentée. Traitement de l’image. Opérateurs augmentés.

A côté de ces 4 groupes principaux, d’autres thématiques plus spécifiques sont également citées : cryptographie, géolocalisation, …

Tous les pôles mentionnent des technologies numériques et on constate que 50% des projets "pôles" déposés en 2018 et 2019 concernent le développement d’une solution numérique en réponse à une problématique "business" donnée. Si l’on inclut les projets comportant une dimension numérique en tant d’enabling technologies (Evaluation de la politique scientifique de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, rapports CESE, Analyse interne des projets pôles - SPW), cette proportion s’élève à 80%.

Il est donc indispensable de poursuivre et renforcer les actions entamées depuis fin 2018 en faveur de l’intégration d’une vision numérique au sein de l’action des pôles. Pour rappel, il avait été défini comme une priorité de Digital Wallonia 2 que le numérique soit placé au cœur de l’action des pôles de compétitivité, ce qui signifiait être :

  • Numérique "by default" : les projets doivent systématiquement intégrer l’activation de technologies numériques.
  • Numérique "by design" : les technologies numériques agissent comme "game changer" dans les projets.

Demande. Eléments de traction

Tant l’analyse effectuée par Gartner que l’étude des principaux écosystèmes numériques wallons pointent vers des

domaines d’application prioritaires que nous pouvons brièvement résumer comme suit :

Il s’agit des applications de l’IA (y compris Smart data), de l’IoT et de l’AR/VR pour les secteurs de l’Industrie, de la santé et des industries récréatives.

A ces secteurs exerçant une forte demande en matière numérique, on peut encore ajouter (demandes à la fois mondiale et régionale) :

  • la construction (y compris Smart Building et Smart Cities);
  • les transports (mobilité) et la logistique;
  • l’éducation et la formation.

Deux autres secteurs présentent un intérêt tout particulier pour la Région et devraient faire l’objet d’efforts de développement dans les années à venir :

  • la transition écologique de l’économie et l’optimisation des dépenses énergétiques (pour répondre aux objectifs et engagements européens en la matière, dont le récent Green Deal);
  • l’agriculture (smart farming et circuits courts), pour répondre à la demande croissante du marché wallon et international.

Une étude plus approfondie à l’aune des tendances lourdes des marchés internationaux en matière numérique sera disponible dans une version ultérieure du présent article.

Thématiques fortes. Proposition de priorités technologiques et de domaines d’application


En croisant le résultat des différentes analyses (Offre/Recherche/Demande), 2 axes technologiques forts et 2 domaines d’application prioritaires émergent. Certains sont déjà bien structurés en écosystèmes au niveau régional et leur développement est susceptible d’impacter fortement la croissance économique wallonne.

Pour ce qui est de la recherche, il conviendrait d’activer les leviers régionaux pour renforcer la recherche sur ces axes, en lien avec les entreprises, par exemple en s’inspirant du modèle flamand (IMEC).

Priorités technologiques

Internet des objets

L’IoT constitue une compétence forte de la Wallonie en matière numérique, tant du point de vue des entreprises privées que des capacités de recherche. Or, l’IoT sous-tend pas moins de 5 tendances fortes identifiées par Gartner et dispose potentiellement d’énormes marchés mondiaux dans de nombreux domaines d’application : industrie, Smart Building et Smart Cities, surveillance et sécurité, domotique, systèmes embarqués divers…

Remarquons également que l’IoT constitue un élément crucial en matière de développement de l’économie circulaire en Wallonie, puisqu’il permet d’assurer le suivi et la traçabilité des produits et matériaux, ainsi que la cartographie des ressources, voir notamment http://economiecirculaire.wallonie.be.

Intelligence artificielle

L’intelligence artificielle est sans conteste la technologie numérique phare qui présidera au développement économique des économies de demain. Les débouchés et domaines d’application sont légion et il serait fastidieux de les énumérer ici. La Wallonie dispose d’atouts importants en la matière, en particulier au niveau de la recherche. Elle se concentre surtout dans les universités (près de 200 chercheurs y sont, totalement ou partiellement, consacrés) et couvre des domaines variés tels que la reconnaissance vocale, de l’image, l’aide à la prise de décision, l’analyse des marchés, etc.

Pour autant, la traduction de ces capacités de recherche tarde à se concrétiser en termes d’applications et de succès commerciaux. A nouveau, il convient d’insister sur la nécessaire coopération entre centres de recherche et entreprises (surtout les startups) afin de valoriser rapidement les compétences wallonnes en la matière. L’offre de formation doit également se développer, tant au niveau universitaire que professionnel. Des initiatives ont récemment été prises dans ce sens au niveau des universités et du Forem et doivent être renforcées.

Le programme DigitalWallonia4.AI doit devenir un instrument majeur de la stratégie de développement économique de la Région. Rappelons en outre que l’IA constitue une priorité absolue de l’Union Européenne dans le cadre du Programme DEP (Digital Europe Policy – Horizon Europe).

Technologies émergentes à promouvoir

Se baser uniquement sur l’existant est insuffisant. Parmi les autres technologies avancées, des opportunités de développement importantes existent pour des secteurs prioritaires de l’économie wallonne, secteurs disposant notamment des capacités d’investissement et des effets d’entraînement indispensables pour un effet global sur l’économie wallonne. Ceux-ci correspondent globalement aux pôles.

C’est notamment le cas :

  • des technologies immersives (AR/VR), par exemple en lien avec le secteur de l’industrie, des medias et, dans une moindre mesure, du gaming (à l’exception du serious ou du marketing gaming, qui dispose déjà en Wallonie d’une base de compétences et d’acteurs intéressante).
  • de l’additive manufacturing, qui constitue un atout important de l’écosystème « Industrie 4.0 » wallon identifié par l’AdN.
  • des jumeaux numériques et de la simulation, qui trouvent déjà des domaines d’application intéressants dans l’industrie et la construction, mais doivent encore se développer du point de vue de l’offre privée (la recherche étant assez bien représentée).
  • de la blockchain et de la cybersécurité en général, par exemple en matière de gestion de la logistique, d’une production intelligente ou de traçabilité pour la santé et l’agriculture. Mais tout autant, sinon plus, du point de vue de la sécurité physique et virtuelle des objets connectés que les acteurs wallons mettent à disposition du marché…

A ce niveau, on se doit d’insister sur la nécessité de développer rapidement un écosystème cybersécurité wallon à la fois cohérent et spécialisé (par exemple, en IA et en IoT), sous peine de voir les entreprises wallonnes dépendre massivement de l’étranger pour assurer la sécurité tant de leurs propres opérations que des produits et services qu’elles vendent.

Toutes ces technologies constituent un pilier indispensable pour le développement économique wallon et la compétitivité de la Région au plan international, en vue de relocaliser certaines productions en Wallonie, de développer de nouvelles filières de valeur ajoutée et donc, de créer (ou recréer) de l’emploi.

Domaines d’application

Industrie 4.0

L’objectif fixé par l’Europe est une contribution de 20% de l’industrie manufacturière dans le PIB. En Wallonie, cette contribution est de 14%. L’industrie 4.0 offre une opportunité de tendre vers l’objectif européen et le numérique doit être envisagé comme de nouveaux moyens et outils pour permettre aux entreprises de maintenir leurs activités sur notre territoire, de se développer et d’accroître leur compétitivité

Au niveau de la Belgique, contrairement aux idées reçues, la fédération de l’industrie Agoria a identifié, au sein des 12 entreprises ayant reçu un award « Factories of the Future », une augmentation de l’emploi de 8% et des investissements cumulés pour 561 millions d’euros, entre 2012 et 2016.

Par ailleurs, le secteur du numérique wallon pourrait largement bénéficier des investissements industriels en la matière.

Vu sous l’angle du secteur wallon du numérique, le défi est sa capacité à répondre aux besoins de transformation des entreprises manufacturières afin de :

  • permettre aux entreprises industrielles de faire appel aux services et produits d’entreprises locales, capables de s’adapter à la demande et plus réactives du fait de leur localisation;
  • limiter la dépendance du secteur industriel vis-à-vis de sous-traitants étrangers, potentiellement plus coûteux et moins flexibles;
  • faire bénéficier au secteur du numérique des capacités d’investissement, de recherche et d’innovation du secteur industriel, susceptible de générer un effet d’entraînement;
  • promouvoir les échanges entre le secteur industriel et l’écosystème des startups pour pouvoir accélérer la mise sur le marché de solutions innovantes;
  • développer des expertises de pointe sur des technologies non matures dans le secteur industriel (AR/VR, blockchain, …) pour positionner la Wallonie en tant que leader sur certains marchés.

Le secteur de la santé

Les applications numériques au secteur de la santé sont légion et la demande tant locale qu’internationale est en pleine explosion. Le vieillissement de la population, mais aussi la nécessité de faire face de manière plus efficace à des situations sanitaires inattendues – la récente crise du coronavirus vient de le démontrer – sont les principaux moteurs de cette évolution.

Rappelons que l’e-health couvre des domaines aussi variés et technologiquement avancés que la télémédecine, les dossiers médicaux électroniques, les prothèses imprimées en 3D, les textiles intelligents, la MedTech, le tracking, etc.

Au vu de cette demande, mais aussi de l’importance des technologies "life" et bio-pharma pour la Wallonie, et en s’appuyant sur un écosystème déjà bien développé (voir ci-dessus), les applications numériques de type e-santé semblent devoir faire l’objet d’actions de développement prioritaires pour les années à venir.

Autres domaines d’application

Tout comme pour les priorités technologiques, les forces existantes ne doivent pas masquer les opportunités futures. Nombre d’autres domaines d’application doivent recevoir une attention particulière de la part des autorités wallonnes afin de développer la croissance et la compétitivité du secteur numérique, soit parce qu’ils représentent un secteur stratégique pour la Région, soit pour répondre à une demande en croissance et/ou en mutation.

Relevons principalement :

  • la construction (y compris Smart Building et Smart Cities);
  • les transports (mobilité) et la logistique;
  • le verdissement de l’économie et l’optimisation des dépenses énergétiques;
  • les industries créatives et récréatives;
  • le Smart Farming;
  • l’éducation et la formation.

Pour en savoir plus

À propos de l'auteur.

Djida Bounazef


Agence du Numérique