L’association WalDigiFarm ambitionne de développer le Smart Farming en Wallonie en fédérant la plupart des acteurs concernés. Cet objectif, à la fois cohérent et ambitieux, cadre parfaitement avec la stratégie Digital Wallonia qui soutient activement le projet.
L'Agence du Numérique a rencontré Sébastien Weykmans, membre fondateur de Waldigifarm, pour en savoir plus sur le contexte et les ambitions de cette toute jeune association dédiée au développement du Smart Farming en Wallonie.
Sébastien Weykmans, administrateur délégué de WalDigiFarm
L’usage du Smart Farming se répand petit à petit, quel est son potentiel en Wallonie ?
Sébastien Weykmans : d’après l’étude CBC sur la « Transition numérique et durable du monde agricole », 80% des agriculteurs wallons de moins de 45 ans sont connectés. Parmi ceux-ci, 47% utilisent des outils connectés sur le terrain comme le GPS (89%), les pluviomètres (26%), les capteurs (19%) ou les robots de traite ou de désherbage (7%). Ces chiffres sont en constante évolution. L’offre croissante d’outils numériques performants combinée au renouvellement des générations nous permet d’envisager 100% d’agriculteurs connectés à moyen terme.
Cette croissance impacte aussi d’autres acteurs impliqués dans le développement du Smart Farming tels que les entreprises de travaux agricoles, les éditeurs de logiciels, l’administration (cartographie, etc.), les banques ou les compagnies d’assurances. Leur liste est longue et les secteurs dont ils sont issus très différents. Leur point commun : ils sont tous fournisseurs du monde agricole et peuvent, tous, tirer leur épingle du jeu.
Ces chiffres sont encourageants. Quels sont vos défis pour atteindre votre ambition ?
Sébastien Weykmans : nous constatons plusieurs éléments à améliorer en Wallonie. Une information transparente sur le retour sur investissement n’est actuellement pas disponible pour les agriculteurs. Les questions liées à l’usage des données (propriété, souveraineté, sécurité, etc.) restent aussi sans réponse. Ce manque de clarté fait hésiter un bon nombre à se lancer dans des investissements assez conséquents.
En parallèle, certains aspects techniques doivent aussi être revus. L’interopérabilité des systèmes est faible. A titre d’exemple, les données issues d’une culture (surface, type de sol, date de semis, etc.) peuvent être reprises dans pas moins de 30 plateformes informatiques différentes (privées ou publiques) qui ne communiquent pas entre elles ! L’intuitivité des systèmes n’est pas évidente non plus. Cette lacune rend l’adoption plus contraignante. Nous rêvons, mais est-ce vraiment une utopie ?, d'une simplification telle qu’un manuel d’utilisation serait superflu.
Comment a germé l’idée de fonder WalDigiFarm ?
Sébastien Weykmans : tout est parti d’une discussion en 2018 entre confrères sur l’espace Smart Farming Digital Wallonia de la Foire de Libramont. Nous avons réalisé que nous partagions les mêmes difficultés d’adoption des outils Smart Farming. Nous en avons déduit qu’il était temps de réunir les prestataires de ce marché et les agriculteurs pour une compréhension des spécificités et des besoins réels, actuels et futurs, du secteur agricole. Il s’agit là d’un prérequis essentiel au développement de nouvelles solutions informatiques rentables à coût raisonnable.
Le raisonnement s’est poursuivi avec l’idée de co-construire une vision de l’écosystème Smart Farming idéal en Wallonie, et d’inviter tous les acteurs intéressés à travailler dans la même direction, avec, chacun ses moyens.
Comment allez-vous atteindre ce double objectif ?
Sébastien Weykmans : WalDigiFarm a défini un projet d’une durée de 3 ans (2019-2022) sur plusieurs axes. Chacun se traduit par des actions concrètes :
- Stimuler et renforcer l’usage du numérique par l’organisation de formations et le partage d’expérience. Une thématique sera traitée de façon approfondie chaque année. Nous commençons dès le 19 novembre 2019 avec la modulation intra-parcellaire des intrants en grandes cultures (une formation suivie de plusieurs activités jusque juin 2020). S'inscrire à la formation modulation intra-parcellaire en grandes cultures.
- Jouer le rôle de think tank (laboratoire d’idées) pour la transition numérique du secteur agricole wallon. Nous avons l’intention de préparer, entre autres, avec les parties prenantes, le cadre réglementaire à l’adoption des techniques de robotique en Wallonie. Cette approche évitera certaines déconvenues comme l’échec du développement des applications drone.
- Coconcevoir les futurs outils de Smart Farming. Nous allons lancer une étude d’interopérabilité des systèmes informatiques des acteurs économiques qui le souhaitent.
- Déterminer les structures adéquates pour gérer ces outils équitablement pour les producteurs de données agricoles. Nous souhaitons monter une société d’échange de datas entre acteurs wallon du monde agricole, dont les actionnaires seraient les producteurs de données.Cette structure sera mise en place sur base de l'étude d'un business model réalisé par le centre d’innovation et de développement d’entreprises EKLO (anciennement CIDE Socran).
Votre action portera d’abord sur les grandes cultures, pourquoi ce choix ?
Sébastien Weykmans : c’est assez simple, les grandes cultures ont un retard de 20 ans à combler en matière d’échange de données sur le secteur de l’élevage ! Nous envisageons plusieurs collaborations avec Elevéo, l'association wallonne des éleveurs (ex awé).
Outre l’ambition de connecter tous les agriculteurs wallons, quels sont vos objectifs à moyen terme ?
Sébastien Weykmans : d’ici 2022, nous espérons rassembler 160 agriculteurs et entreprises de travaux agricoles ainsi que 30 entreprises. Si notre projet aboutit, nous souhaitons le pérenniser en créant une société de valorisation des données agricoles wallonnes dont les actionnaires seraient les agriculteurs connectés et d’autres producteurs comme les propriétaires de réseau de stations météo.
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